Chapitre séculier - Fiche valide
Aignan est l'évêque d'Orléans qui défendit sa cité contre Attila, deux ans avant sa mort en 453. La basilique dédiée au saint évêque d'Orléans est attestée au début du VIe siècle dans la Vie de sainte Geneviève qui aurait fait un miracle dans la "basilique de saint Aignan évêque". Elle se situe à l'est à une centaine de mètres des murs du castrum, près de la Loire, dans la nécropole située au bord de la route qui conduit à Sens. Grégoire de Tours (mort en 594) mentionne en effet l'inhumation de l'évêque Namatius d'Orléans en 587 "dans la basilique de saint Aignan". Saint-Aignan devient un grand sanctuaire du nord de la Gaule, mentionné dans la Vie de sainte Geneviève et par Fortunat de Poitiers. Le testament de Leodebodus, daté de 640 par J. Barbier, indique que l'intéressé est l'abbas de la "basilique du seigneur Aignan où ce même seigneur repose en entier", où vivent des moines (monachis ibidem desservientibus). Cela fait dire à J.-Ch. Picard que Saint-Aignan est alors une communauté monastique, mais comme l'historien le reconnaît lui-même, le testament n'est connu que d'une copie du XIe siècle, laquelle pourrait être interpolée par Helgaud de Fleury, d'autant que c'est ce testament qui révèle la fondation par Leodebodus du monastère de Fleury où des moines doivent vivre selon les règles de Benoît et de Colomban. La reine Bathilde (morte vers 680) indique Saint-Aignan dans la liste des basiliques majeures où elle voudrait voir vivre des moines selon les règles de Benoît et de Colomban, ce qui n'est pas nécessairement advenu. Vers 670 débute la frappe d'un denier d'argent à Orléans au profit de l'Eglise majeure et de Saint-Aignan. Carloman, frère de Charlemagne, poursuit cette activité en faveur des mêmes. Evêque d'Orléans depuis 798, Théodulf reçoit de l'empereur le gouvernement des abbayes de Fleury, Saint-Aignan et Saint-Liphard de Meung. La "règle" d'Aix aurait été imposée à Saint-Aignan. Ainsi, des chanoines séculiers ont succédé à des clercs séculiers qui desservaient depuis des siècles cette basilique. Le testament d'Anségise de Fontenelle (mort en 833) fait un legs aux chanoines vivant à Saint-Aignan ("ad sanctum Anianum in Aurelianis libram unam, illis canonicis in domo similiter"). En 854, l'évêque Agius autorise les "chanoines du monastère Saint-Aignan" à transférer le cimetière de leur communauté dans un champ qu'ils possédaient au bord de la route d'Autun, où plus tard s'élévera la chapelle Notre-Dame-du-Chemin. Cette année-là, l'évêque assure la défense de la ville contre les Normands. L'église, située hors des murs, aurait été incendiée par ces Normands en 865. Selon Thierry de Fleury, les Bénédictins de Fleury mettent en sûreté "dans le monastère Saint-Aignan" les reliques de saint Benoît autour de 885. Les Robertiens deviennent les abbés laïcs de Saint-Aignan. A la fin de son règne, Robert II (mort en 1031) fait reconstruire l'église avec de grandes dimensions (80 m environ sur 22 m, 19 autels) et la dote généreusement comme en témoigne le texte d'Helgaud de Fleury. La collégiale est dédicacée en 1029. Le moine de Fleury qualifie le lieu de "monasterium" et ne précise jamais la qualité de ses occupants. L'Atlas de la France de l'an mil considère que le lieu était une abbaye d'hommes en 617 et qu'elle devint une collégiale en 1029 au moment de sa restauration sur la foi d'Helgaud de Fleury. De la collégiale romane, il reste la crypte, avec des chapiteaux figurés parmi les plus anciens de l'art roman.
En 1187 (v.st.), Philippe Auguste prend sous sa protection une aumône fondée à Orléans pour accueillir 13 pauvres et pour laquelle son clerc, maître Bertier, avait affecté ses maisons "du cloître Saint-Aignan" et plusieurs dîmes. En 1189 (v.st.), il atteste que maître Bertier, chanoine de la cathédrale d'Orléans, agissant au nom de "l'aumône Saint-Aignan", a conclu un accord pour une dîme.
Détruite au milieu du XIVe siècle, l'église est relevée sous Charles V. En 1358, les chanoines obligent l'évêque à faire une station chez eux lors de sa première entrée. Durant l'hiver qui suit, les Orléanais, dirigés par le bailli et le capitaine de la ville, détruisent violemment l'église pour que Robert Knowles ne vienne pas y trouver refuge. Une enquête menée devant le Parlement en 1367 et un arrêt rendu par lui en 1372 permettent de comprendre comment s'est déroulée la démolition, mais les habitants de la cité opposent leur version à celle du chapitre. Le chapitre obtient finalement une réparation de 12 000 l.t. pour la destruction de leur église, alors qu'il en demandait 200 000. En 1364, l'évêque fait station et prête le serment accoutumé devant un autel de fortune élevé devant la porte de Bourgogne. En 1372, son successeur Jean Nicot en fait autant sur un autel érigé au milieu des ruines. Ancien chanoine du lieu, celui-ci veut relever l'église, mais la ville s'y oppose, puisque cela constituerait à nouveau un danger. C'est à Saint-Euverte que l'évêque dort en principe la veille de sa joyeuse entrée. Charles V lève l'interdiction de reconstruire le lieu en 1376, un an après la mort du premier duc d'Orléans, mort sans héritier. Devant la menace anglaise en 1428 et quelques mois avant le célèbre siège, l'église est abattue par les Orléanais à titre préventif. L'église est ensuite reconstruite. Louis XI réside plusieurs fois dans une maison située dans le cloître Saint-Aignan. L'église est à nouveau dédicacée en 1509. Les protestants abattent les premières travées de la nef qui ne seront jamais réédifiés. Un bourg constitué d'un important quartier canonial s'est bâti autour de la collégiale. Il semble qu'à la fin du Moyen Age le roi soit chanoine de Saint-Aignan.
L'église est ordinairement fermée. La crypte se visite aux journées du Patrimoine. Les bâtiments qui jouxtent l'église sont occupés par le séminaire interdiocésain et l'évêché. P. C. Timbal affirme que le site fut primitivement dédié à saint Pierre, avant la naissance du culte de saint Aignan. Il ajoute, en vertu d'une interprétation fort douteuse, que cette première église était la première cathédrale de la cité. La position extra muros permet d'en douter, car Sainte-Croix d'Orléans est bien construite contre le mur intérieur nord du castrum
Grégoire de Tours (mort en 594) parle d'une basilique, qui devait être nécessairement desservie par des clercs puisqu'il s'agit de la plus importante des faubourgs de la ville. Leodebodus se déclare être l'abbas de la basilique dans son testament de 640. Cette source indique la présence de "moines desservant ce lieu (monachis ibidem desservientibus)", mais nous pensons que la copie du XIe siècle, qui fait connaître le testament, a été interpolée en cet endroit. Le même document, copié par Helgaud de Fleury avant sa Vie de Robert le Pieux, est celui qui indique aussi la fondation de l'église de Fleury et du monastère Saint-Pierre où doivent vivre des moines suivant les règles de saint Benoît et saint Colomban. Cela fait dire aussi à Helgaud, dans la Vie royale, que l'église Saint-Aignan avait précédemment le vocable de Saint-Pierre, invention reprise peu après dans les Miracula S. Aniani
Il est possible qu'il y ait une interruption de la vie canoniale à Saint-Aignan dans le courant du IXe siècle, ce qui expliquerait la restauration du lieu par Robert le Pieux
Avant 833, le testament d'Anségise de Fontenelle fait un don aux "chanoines" de Saint-Aignan. En 854, l'évêque d'Orléans s'adresse "aux vénérables chanoines du monastère Saint-Aignan"
L'obituaire de la cathédrale de Chartres du XIe siècle retient l'obit d'Hugues, "chanoine et archidiacre [de Chartres], et doyen de Saint-Aignan d'Orléans". Etienne de Garlande cumule à Orléans les décanats de la cathédrale, de Saint-Samson et Saint-Aignan. En 1462, l'évêque unit au doyen une prébende canoniale, car les revenus du dignitaire s'élevaient seulement à 30 l.p.
Robert II et Louis VI sont abbés laïcs de Saint-Aignan
Le roi et le duc d'Orléans sont cités dans le pouillé du XVIe siècle
Le pouillé du XVIe siècle précise qu'il s'agit du chantre sans la prébende
Le pouillé du XVIe siècle mentionne la prébende du chefcier
Archives départementales du Loiret, 20 G
A. Molinier, Obituaires de la province de Sens, Paris, 1906 (Recueil des Historiens de la France. Obituaires, 2), p. 14
cn-telma.fr/originaux/charte2784
Helgaud de Fleury, Vie de Robert le Pieux..., éd. R.-H. Bautier et G. Labory, Paris, 1965, p. 106-112
A. Longnon, Pouillés de la province de Sens, Paris, 1904 (Recueil des Historiens de la France. Pouillés, 4), p. 335
Recueil des actes de Philippe Auguste, éd. E. Berger, H.-Fr. Delaborde, Paris, 1916, t. 1, n°218, n°259
Lumières de l'an mil en Orléanais. Autour du millénaire d'Abbon de Fleury, Turnhout, Brepols, 2004, p. 73-77
R. Hubert, Antiquitez historiques de l'église royale Saint Aignan d'Orléans, Orléans, 1661
P. C. Timbal, "Un épisode de la guerre de Cent ans : la destruction de la collégiale Saint-Aignan au XIVe siècle", Bulletin de la Société Archéologique et Historique de l'Orléanais, n.s., t. 4, 1965, p. 65-70
P. Martin, Th. Rapin, "La reconstruction du choeur de Saint-Aignan d'Orléans au XVe siècle", Arts sacrés. Cahiers de Rencontre avec le Patrimoine religieux, n° 14, 2001, p. 82-99
J.-Ch. Picard, "Orléans", dans Topographie chrétienne des cités de la Gaule..., t. 8, Paris, 1992, p. 91-92
J. Barbier, "La reine fait le roi : une révision de la date du "testament" de Leodebodus", dans Retour aux sources. Textes, études et documents d'histoire médiévale offerts à Michel Parisse, Paris, 2004, p. 31-42
M. Parisse dir., Atlas de la France de l'an mil, Paris, 1994, p. 42
Fr. Le Maire, Histoire et antiquitez de la ville et duché d'Orléans..., Orléans, 1648, p. 87
Les informations en italique sont incertaines
Auteur(s) de cette notice: Jean-Vincent Jourd'heuil, le 27/7/2022
Pour citer cette fiche:
Jean-Vincent Jourd'heuil, « Fiche de la collégiale Saint-Aignan de Orléans », Collégiales - Base des collégiales séculières de France (816-1563) [en ligne </?i=fiche&j=648>], version du 27/7/2022, consultée le
Le testament d'Anségise de Fontenelle (mort en 833) mentionne un don aux "canonicis" de Saint-Aignan d'Orléans