Chapitre séculier - Fiche valide
Fondée à la fin du Xe siècle par les seigneurs de Chabanais, la communauté de Lesterps semble être d'abord placée sous la protection apostolique. Un siècle plus tard, les descendants des fondateurs soutiennent l'adoption de la règle de saint Augustin. Après la mise en commende en 1375, l'établissement est placé vers 1657-1676 sous la tutelle des chanoines réguliers de Sainte-Geneviève de Paris (voir sur l'état des fonds manuscrits, BECQUET, 1973, p. 111-114)
L'acte de Léon IX approuvant la vie canoniale menée à l'église Saint-Pierre de Lesterps par l'abbé Gauthier et ses frères (1048-1054) est un faux (BECQUET, 1973, p. 118).
Pour Yannick Veyrenche, "l’introduction de la règle de saint Augustin, [peut être] mise au crédit du premier abbé Foucher (1076-après 1093) et confirmée assez longtemps après la venue du légat Hugues de Die (en 1081 probablement), du temps néanmoins de l’évêque de Limoges Guy de Laron (1073-1086)" (VEYRENCHE 2020, p. 46). La régularisation de la communauté est documentée par la charte de confirmation de la fondation, rédigée en 1093 ou 1094 par le seigneur de Chabanais Jourdain V. Ce descendant des fondateurs affirme avoir aidé son père à instituer la règle de saint Augustin à Lesterps. Racontant les recommandations de Jourdain IV avant son départ en pèlerinage pour la Terre sainte, il affirme : "et n'ayant pas ménagé ses instances au sujet de ce monastère de Lesterps, pour que je l'augmente, le garde et l'accroisse, et que je défende et chérisse la discipline régulière que lui-même avait, avec mon aide, récemment établie en cet endroit selon l'observance de saint Augustin, il me fit son dernier adieu" (traduction de dom Becquet dans LES AMIS DU VIEUX CONFOLENS, 1981, p. 5-6. Edition : "nec mediocriter super hoc Stirpensi coenobio me deprecatus ut eum augerem, custodirem, et multiplicarem, et regularem disciplinam, quam secundum ordinem sancti Augustini noviter ipse, me cooperante, inibi statuerat, defenderem et amarem, ultime vele fecit". Gallia christiana, t. II, Instrumenta, pièce n° XLI, col. 197).
Alexandre III prend le monastère sous la protection apostolique et lui confirme en 1179 la possession de 9 églises, à la demande de l’abbé Boson (Gallia christiana, t. II, col. 623. Charte originale non retrouvée : BECQUET, 1973, n°94, p. 139). Sur le réseau d'églises dépendantes de Lesterps, voir BECQUET, 1972, p. 108-113.
La mise en commende intervient en 1375 (Lettres secrètes et curiales du pape Grégoire XI, n°1841 et 1842)
Sous l’abbatiat de Charles-François de La Vieuville, évêque de Rennes et abbé commendataire de Lesterps de 1657 à 1676, la communauté est reprise en main par les chanoines réguliers de Sainte-Geneviève de Paris (Gallia christiana, t. II, col. 623). L’église devient paroissiale à une époque indéterminée dans la documentation publiée
Les fondateurs de l'abbaye de Lesterps donnent une chapelle pour que la communauté de chanoines soit créée. Cette chapelle préexiste donc à la collégiale, sans que l'on connaisse ni sa date de fondation ni son statut. Elle est détruite vers 1040, dans un incendie provoqué par la guerre féodale entre les seigneurs de Chabanais et le comte de la Marche
La nef de la nouvelle église aurait été construite en premier (entre 1050 et 1070), tandis que le clocher-porche relèverait d'une capagne suivante (entre 1070 et 1091) (ANDRAULT-SCHMITT, 1991, p. 209)
Saint-Pierre est en relation avec :
Changement de statut de la communauté séculière vers une communauté régulière
Le premier abbé connu est Gauthier. Il joue un rôle clef dans l'histoire de la communauté en parvenant à faire reconstruire l'établissement, contre l'avis de l'évêque mais avec le soutien du pape, après le grand incendie survenu vers 1040 : il est mentionné dans ce contexte par 2 bulles disparues, l'une de Benoît IX (1033-1048) et l'autre de Victor II (1054-1057). Il est principalement connu par la vita que lui a consacré Marbode de Rennes vers 1091-1096 (SOCIETE DES BOLLANDISTES 1680, p. 701-706). Il serait mort septuagénaire ou octogénaire en 1070. D'après la Chronique de Saint-Maixent, il est commémoré à l'autel à partir de 1091 (VERDON 1979, p. 150)
L'abbé Adémar, qui succède à Gauthier, est le fils du comte d'Angoulême Guillaume. Il devient évêque d'Angoulême en 1076
Foucher est abbé au moment de la régularisation du chapitre
L'église a été classée par liste en 1862. Elle fait partie du réseau de médiation culturelle Abbatia. Des sondages archéologiques ont été réalisés dans les galeries du cloître (MONTIGNY, 2019).
Notice dans la base Mérimée : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/PA00104390
éd. G. Babinet de Rencogne, "Notice et dissertation sur un fragment du cartulaire de l'abbaye de Lesterps", Bulletin de la Société archéologique de la Charente, 3e série, t. 4, 1864, p. 47-63, https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k208912g
éd. G. Babinet de Rencogne, "Charte d'Almodis, comtesse de la Marche en faveur de l'Esterps, 1098", Bulletin de la Société archéologique et historique de la Charente, 3e série, t. 4, 1864, p. 409-414, https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k208912g
Gallia christiana in provincias ecclesiasticas distributa, t. II, Paris, 1720, col. 620-6203 ; Instumenta, pièces n° XXXIX-XLI, col. 194-198
éd. et trad. J. Verdon, La chronique de Saint-Maixent (751-1140), Paris, Les Belles Lettres, 1979, p. 140-141 et 150-151
éd. L. Mirot, H. Jassemin, J. Vieillard, G. Mollat, Lettres secrètes et curiales du pape Grégoire XI (1370-1378) relatives à la France extraites des registres du Vatican, Paris, E. de Boccard, 1935-1957
éd. Société des bollandistes, Acta sanctorum. Maii, tomus II, Bruxelles, Culture et civilisation, 1680, p. 701-706
C. Andrault-Schmitt, "Les premiers clochers-porches limousins (Evaux, Lesterps, Limoges) et leur filiation au XIIe s.", Cahiers de civilisation médiévale, 34, 1991, p. 119-223, http://www.persee.fr/doc/ccmed_0007-9731_1991_num_34_135_2495
C. Andrault-Schmitt, "Lesterps, église Saint-Pierre", Congrès archéologique de France, 153e session, Charente, 1995, Paris, Société française d'archéologie, 2000, p. 253-266
J. Becquet, "Les chanoines réguliers de Lesterps, Bénévent et Aureil en Limousin aux XIe et XIIe siècles", Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. 101, 1972, p. 80-135 (réédition fac-similée dans BECQUET, 1985)
J. Becquet, "Collégiales de chanoines séculiers en Limousin aux Xe-XIIe siècles", Bulletin de la Société historique et archéologique du Limousin, t. 103, 1976, p. 76-106 (réédition fac-similée dans BECQUET, 1985)
J. Becquet, La vie canoniale en France aux Xe-XIIe siècles, Londres, Valiorum reprints, 1985
J. Becquet, "Le bullaire du Limousin", Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. 100, 1973, p. 111-114, p. 117-120, p. 124, p. 128, p. 139, p. 142
V. Dujardin, E. Moinot, Lesterps. Abbaye Saint-Pierre, mairie, couvent, Poitiers, Service de l'inventaire Poitou-Charentes, 2005, https://gertrude-diffusion.poitou-charentes.fr/dossier/abbaye-saint-pierre-mairie-couvent/9cfe0793-4f4d-4a24-aeb4-dbe98c9be796
A. Massoni, "Les collégiales limousines du Moyen Âge, enjeux de pouvoir entre l’Église et le siècle", dans Collégiales et chanoines de la France au Moyen Âge à la Révolution, dir. A. Massoni, Limoges, Pulim, 2010, p. 81-93
J. Nanglard, Pouillé historique du diocèse d'Angoulême, t. 3, Angoulême, G. Chasseignac,1894-1903, p. 71-82
A. Trumbore Jones, "“Customs confirmed by reason and authority”: the function and status of houses of canons in tenth-century Aquitaine", dans Where Heaven and Earth Meet : Essays on Medieval Europe in Honor of Daniel F. Callahan, éd. M. Frassetto, Leiden, Brill, 2014 (Studies in the History of Christian Traditions, 174), p. 101-121
Y. Veyrenche, "Les chanoines réguliers en Limousin (XIe - XIIe siècles), de la réforme aux réseaux canoniaux", dans Israël du Dorat : être chanoine en l’an Mil. Discipline, culture, cadres institutionnels et monumentaux des chanoines entre les temps carolingiens et la Réforme grégorienne, dir. A. Massoni, E. Sparhubert, Limoges, PULIM, 2020, p. 39-66
éd. Les amis du vieux Confolens, Promenade dans Confolens autrefois, Confolens, Les amis du vieux Confolens, 1981
dir. A. Montigny, Nouvelle-Aquitaine, Charente, Lesterps : ancien cloître de l’abbaye, Bègles, INRAP Grand-Ouest, 2019 (Rapport d'opération: diagnostic archéologique)
Les informations en italique sont incertaines
Auteur(s) de cette notice: Manon Durier / Anne Massoni, le 25/7/2022
Pour citer cette fiche:
Manon Durier / Anne Massoni, « Fiche de la collégiale Saint-Pierre de Lesterps », Collégiales - Base des collégiales séculières de France (816-1563) [en ligne </?i=fiche&j=1353>], version du 25/7/2022, consultée le
La charte de fondation de l'abbaye de Lesterps stipule la donation par Jourdain, fils d’Abon, et sa femme Dia d’une chapelle et de diverses sources de revenus pour que soit érigé un "monasterium". Dirigée par un recteur ou par un abbé, la communauté est placée sous l’autorité directe du pape : il s'agit donc à l’origine de chanoines séculiers. Bien que le manuscrit original soit perdu, le texte est connu par 2 éditions : l'une d'après l'acte original et suivie par des additions postérieures à la régularisation un siècle plus tard (Gallia christiania, t. II, Instrumenta, pièce n°XXXIX, col. 194-195), l'autre d'après le cartulaire de l'abbaye rédigé au XIIIe siècle (BABINET DE RENCOGNE, 1864, p. 50-52). Cet acte est considéré comme faux ou interpolé (BECQUET, 1976, p. 80 ; VEYRENCHE, 2020, p. 46, n. 21 et p. 52, n. 50), mais l'analyse textuelle permet de considérer que la teneur de la charte est respectée.
La datation de la fondation reste incertaine. La Gallia Christiana propose 1032, en considérant Gauthier comme le premier abbé. Or c'est impossible puisque la charte de confirmation de la fondation, qui porte le millésime 1093, est écrite par Jourdain V de Chabanais, distant de 5 générations du fondateur Jourdain Ier. Gustave Babinet de Rencogne s'est fondé sur une série d'hypothèses pour proposer une datation vers 975 : il calcule d'abord (grâce à la datation de l'abbatiat de Foucher) que Jourdain V devait avoir 30 ou 35 ans en 1093, comptant 30 ans entre chaque génération, il en déduit ensuite que Jourdain Ier est né entre 908 et 913 et ajoute 65 ans pour trouver l'année de la charte car il estime que le seigneur de Chabanais n'a pu faire cette fondation que sur le tard (BABINET DE RENCOGNE, 1864, p. 54-55). On sait aujourd'hui que Jourdain II, fils du premier du nom, meurt à l'âge adulte entre 1010 et 1014 (DEBORD 1984, p. 489). L'estimation de l'archiviste-paléographe, généralement admise, pourrait donc être juste mais elle pourrait aussi être rapprochée de l'an Mil. Une note manuscrite au dos du cartulaire, datée du XVIIIe siècle, indique d'ailleurs une fondation en 986 (BABINET DE RENCOGNE, 1864, p. 53)